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Espagne : quatre ans de prison contre un Algérien ayant piloté un canot de migrants

Un citoyen algérien a été condamné par un tribunal espagnol pour avoir piloté un canot avec huit migrants à son bord, dont une femme enceinte, a indiqué jeudi l’agence Europa Press. L’homme a toujours nié être le conducteur du bateau et se présente comme « un passager de plus ».

Quatre ans et neuf mois de prison. C’est la peine prononcée par le Tribunal supérieur de justice d’Andalousie (TSJA) à l’encontre d’un citoyen algérien, a rapporté jeudi 7 décembre l’agence espagnole Europa Press. L’homme était jugé pour avoir conduit une embarcation de migrants avec huit personnes à son bord, dont une femme enceinte.

Le canot avait été localisé le 10 septembre vers 15h au large de la plage d’El Lancon, à Carboneras (province d’Almeria), dans le sud de l’Espagne, par un agent de la garde civile hors service ce jour-là.

Son récit a pesé lourd dans la décision du juge. Selon le témoignage de cet agent, d’une « crédibilité subjective » d’après la cour, l’Algérien est la personne qui a « approché le bateau à terre » pour faciliter le « débarquement des occupants » sur le sol espagnol. Cette scène a été « visualisée de manière nette, indubitable et concluante » par le membre de la garde civile, insiste le tribunal.

« Un passager de plus »

L’accusé, lui, a toujours nié, avoir piloté le Zodiac de « manière continue tout au long de la traversée ». Il se présente comme « un passager de plus » parmi ceux qui se sont « alternés » pour conduire l’embarcation. « Le condamné a laissé entendre sa malchance » d’avoir été aperçu à la barre du canot à son arrivée en Espagne, souligne la cour.

Mais pour le juge, cette défense ne tient pas. Elle est même « invraisemblable ». La manœuvre consistant à amarrer un bateau sur une plage « exige une grande expertise », assure le magistrat.

L’Algérien a également été reconnu coupable d’avoir mis en danger les occupants de l’embarcation. La traversée entre les côtes algériennes et l’Andalousie, longue d’environ 185 km, est particulièrement dangereuse, en raison des courants et des canots en mauvais état dans lesquels prennent place les migrants. Dans cette affaire, la justice rapporte que le voyage a été « prolongé de plusieurs heures, dont une partie la nuit, sur un bateau inadéquat et surchargé, sans lumières ni mesures de sécurité, et sur un trajet avec un trafic maritime intense ».

De plus, la traversée de la Méditerranée s’est faite « dans des conditions météorologiques non favorables, avec des vagues allant jusqu’à 1,25 mètres », provoquant « la dérive » de l’embarcation et amenant « un certain danger pour la vie ou l’intégrité des personnes transportées ».

Cette route migratoire est empruntée par les « harragas », littéralement ”brûleurs de frontières”. Des citoyens et citoyennes d’Algérie désespérés par le manque d’opportunités dans leur pays, et ce, malgré l’instauration d’une allocation chômage en 2022. Des milliers d’entre eux, y compris des familles entières, traversent cette zone maritime, au péril de leur vie.

L’Espagne connait cette année une hausse des arrivées de migrants, depuis les côtes algériennes. Depuis janvier, 13 044 personnes ont atteint le pays depuis l’Algérie (via l’Andalousie ou les îles Baléares), contre 11 699 sur l’ensemble de 2022, soit une augmentation de 11,5%.

Quatre ans pour quatre autres passeurs

Mais d’autres routes sont également empruntées pour rejoindre l’Espagne. Celle entre l’Afrique de l’Ouest et les Canaries connait un regain d’intérêt cette année, avec l’arrivée de plus de 35 000 migrants, un record depuis 2006 et la précédente « crise des cayucos » où environ 31 000 personnes avaient débarqué sur l’archipel.

Et dans ces eaux aussi, des passeurs sont traduits en justice. Selon un article de l’agence de presse Efe publié jeudi, quatre propriétaires d’un canot, confondus par des exilés, ont chacun été condamnés par le tribunal supérieur de justice des îles Canaries (TSJC) à quatre et demi de prison.

Retour sur l’affaire. En novembre 2021, 20 migrants prennent place dans une pirogue depuis la Mauritanie, en échange de 400 euros. Pendant 20 jours, ils traversent l’océan Atlantique dans des conditions particulièrement difficiles, sans gilets de sauvetage, avec très peu d’eau et de nourriture.

Le bateau utilisé, d’à peine 15 mètres de long et deux de large, était « absolument inadéquat » à un tel voyage, selon la cour, et a causé un drame. À bord, les autorités espagnoles ont retrouvé un corps. L’homme est décédé peu de temps avant d’atteindre la terre ferme selon les conclusions de l’enquête. Il s’est noyé à l’intérieur du canot, en raison d’un œdème pulmonaire aigu dû à une asphyxie. Plusieurs personnes étaient également blessées et présentaient des signes de déshydratation et d’hypothermie sévère.

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